Ft. Carolyn


Depuis quelques jours déjà le froid commençait tout doucement à faire son apparition sur le village. Petit à petit le soleil laissait place à de gros nuages gris qui menaçaient d'éclater et de pleurer à tout moment. Il ne faisait plus assez chaud pour pouvoir lézarder au soleil durant des heures, mais la plage était un endroit qui restait appréciée des habitants de Rollington même si la fin de l'été et la rentrée des classes faisait qu'il y avait bien moins de monde en train de fouler le sable fin en ce début d'après-midi. Le vent s'engouffrait dans mes cheveux, faisant voler quelques mèches blondes que je portais sur le crâne depuis que j'étais gamine alors que l'odeur du sel marin me rappelait mon enfance. J'avais eu la chance de grandir à Liverpool, sur la côte anglaise, et ainsi de pouvoir profiter plus d'une fois du merveilleux spectacle que pouvait offrir l'eau lorsque le temps était orageux comme aujourd'hui. Les vagues se faisaient hautes avant de venir s'écraser sur le sable et de laisser l'écume envahir la plage sur quelques centimètres, voire quelques mètres parfois. Pieds nus, je marchais au bord tout en laissant l'eau venir lécher mes orteils. Divers frissons parcouraient mon échine, mais je n'aurais échangée ma place pour rien au monde. Le calme autour de moi était des plus reposants. Malgré les regards qui se tournaient en ma direction à chaque nouveau pas que je faisais, j'avais envie de rester ici durant des heures. Par moment les bourrasques de vent se calmaient pour repartir de plus belle à peine quelques minutes plus tard. Les bras croisaient sous la poitrine, mes doigts attrapaient les manches du sweat, bien trop grand pour moi, que je portais alors que j'effectuais une légère pression sur mon buste comme si je voulais me réchauffer. La capuche sur la tête, je haussais les épaules pour éviter à l'air d'entrer directement en contact avec ma peau de part mon col et je continuais ma petite promenade encore quelques minutes avant d'apercevoir une silhouette féminine qui attirait mon attention. Plutôt grande et blonde, j'avais l'impression de la connaître. Je m'approchais l'air de rien tout en scrutant les alentours, envoyant mon regard sur elle de temps en temps et quelques secondes plus tard j'étais capable de mettre un prénom sur ce visage que je pouvais à présent distinguer. Il s'agissait de Carolyn, une candidate avec laquelle je n'avais eu le temps d'échanger que de vulgaires banalités et qui avait eu un soit-disant flirt avec Graham. Souriante, mais pas hypocrite pour autant, je m'approchais d'elle avant de constater d'une voix douce :  « Je pense qu'on risque de se prendre un orage sur la tête dans très peu de temps. » Je ne mentais pas. L'air était de plus en plus poisseux et la forte odeur d'algue ne trompait pas, mais sans rien lui demander je prenais place à ses côtés sur le sable, ramenant mes jambes contre mon buste avant de les encercler de mes bras et de poser mon menton sur mes genoux. Mon regard se perdait sur l'horizon et les coques des bateaux, au loin, qui naviguaient vers le port.

Certains diront que je suis bizarre alors que d'autres diront que je ne le suis pas plus que la normale. Et moi, je crois plus la seconde solution, oui c'est bizarre de choisir la plage comme lieu pour réfléchir mais il y a des choses bien plus bizarre dans ce bas monde. Moi j'étais comme cela, quand j'avais besoin de réfléchir, il n'y avait que deux lieux que je trouvais parfait pour cela, le toit qui offrait une incroyable vue sur la ville. Mais si j'aimais ce lieu, c'était surtout pour le calme qu'il offrait et aussi parce que je n'avais pas beaucoup marcher pour m'y rendre. Moi ? Feignante ? Non pas du tout .. Le hic, c'était que j'avais vu un autre candidat y monter et pour réfléchis, discuter avec quelqu'un n'est souvent pas la solution idéale, alors j'avais pris mes tongs et j'étais partie à la plage. En marchant, je regardais le ciel, il était gris et j'avais le sentiment qu'il y avait encore plus de nuages que ce matin quand je me suis réveillée. La pluie allait surement faire des siennes dans un futur proche mais cela m'était égale, ma nourrice me disait toujours que "je n'étais pas en sucre et que l'eau n'allait pas me faire fondre", enfant cette pensée m'a terrorisée. Mais une fois adulte, j'ai réalisé qu'elle avait raison et que la pluie avait quelques choses de calment, une douceur étrange et rassurante. En arrivant sur la plage, j'avais jetée un coup d'oeil furtif en direction de l'eau où il n'y avait pas grand monde, surement quelques personnes espérant un rayon de soleil. Mais c'était en vain selon moi. Je choisi alors de m’asseoir sur le sable, les yeux rivés sur l'océan, c'était magique et idéal pour réfléchir. Il est vrai qu'il ne se passait pas grand chose sur l'eau mais je m'en fichait, je réfléchissais à tellement de choses que l’océan me semblait plein. Il fallait que je pense au conseil, au bon choix à faire pour éliminer les loups, même si cela entraînait la nomination de personnes que j'appréciais, c'était le jeu. Mais mon plus gros soucis était que je n'avais pratiquement plus de suspect, enfin quelques uns mais était-ce vraiment des bonnes idées ? Je pensais à tout cela quand j'entendis une voix. Une voix que je n'avais pas beaucoup entendu dans l'émission et qui je pensais ne m'appréciait pas suite à la rubrique de Candice alors je ne pensais pas qu'elle viendrait me parler, pas volontairement. « C'est fort probable, les vagues ont l'air déchaînés. » Il s'agit bien entendu de Lennon, une demoiselle que je ne connais pas vraiment. Levant le regard vers elle instinctivement, je lui offris un sourire. alors qu'elle s'installait à mes côtés. « Je ne sais pas si c'est normal ici, mais on déjà beaucoup de soleil, je trouve, la pluie fera peut-être un peu de bien en rapportant de la fraicheur. »

Sans le savoir réellement j'avais un énorme point commun avec Carolyn. Tout comme moi, la demoiselle était plutôt appréciée de Graham et je devais avouer que cela avait le don de me rendre presque jalouse, limite folle de rage en réalité, mais je ne voulais pas passer pour la sorcière de l'histoire et encore moins pour la quasi petite amie complètement possessive et accro à son homme. Ainsi je décidais d'adresser la parole à la blonde en commençant par une nouvelle banalité, en parlant de la pluie et du beau temps. Les vagues étaient déchaînées comme elle venait de le dire et j’acquiesçais d'un bref signe de la tête alors qu'un fin sourire s'emparait de mes lèvres. Elle continuait toujours sur la question du temps et je ne pouvais m'empêcher de lui répondre: « Sauf qu'en règle générale, avant la pluie vient l'orage. » Mes pupilles étaient fixées sur l'horizon, sur l'océan, sur les vagues et avant qu'elle n'ai le temps de rajouter quoi que ce soit d'autre voilà que je venais lui poser une question. « En parlant d'orage, et même si cela n'a aucun rapport, je peux savoir ce qui se passe entre Graham et toi ? » Mon regard déviait en sa direction et vous pouvez me croire il n'avait rien du regard innocent et enfantin que je portais bien trop souvent à mon gout. « J'ose te poser la question parce que j'ai comme l'impression que vous êtes bien en train de vous foutre de ma gueule tous les deux et j'ai la sainte horreur qu'on me prenne pour une idiote. » Ma voix était cassante, sèche. Je ne comptais pas me laisser berner devant des centaines de caméras et ça la blonde comme Graham allait très vite le comprendre et s'il fallait se montrer vexante pour le leur faire comprendre il n'y avait strictement aucun problème.

J'étais surprise que Lennon ne me parle et rapidement je me suis dit que cela n'était pas innocent. Presque 4 semaines dans l'aventure en ne s'échangeant que quelques banalités d'usage quand on se croisaient et là, elle venait de discuter. Je trouvais cela étrange mais je dois avouer qu'elle ne m'a jamais rien fait de mal et puis, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas nous parler après tout même si je craignais un peu le sens qu'allait prendre la discussion. Je n'avais rien à me reprocher mais le peu que je connaissais de Lennon était ce que j'en entendais dire dans la villa ou dans les primes, autant vous dire que ce n'était pas une très bonne publicité. Quoi qu'il en soit, elle me parlait du temps, ouais pourquoi pas, si cela pouvait lui faire plaisir, je m'en fichais. Je regardais alors l’océan tout en lui répondant. « Pas forcément même si quand on regarde les nuages ici, je crains que tu ai raison. » Puis le sujet Graham arriva sur le tapis, elle avait tenue plus de temps que je le pensais. Et le petit ton prétentieux était arrivée en même temps que le sujet. Je dois avouer que ça par contre, je ne l'avais pas compris et encore moins apprécier, enfin elle était surement jalouse et ne contrôlait pas son ton de voix alors j'avais décidée de faire abstraction de se détail et de surtout ne pas rentrer dans son jeu en lui répondant sur le même ton, sinon j'étais presque sur que ça allait partir en cacahuètes et je n'avais pas vraiment envie de me battre. « Je comprend que la situation t'énerve mais on peut parler normalement, non ? Surtout qu'il n'y a rien à dire de spéciale entre Graham et moi, on s'entend très bien et on aime bien s'amuser ensemble, on déconne c'est tout. Alors tu peux ranger les griffes, je n'ai pas prévu de te voler ton copain. »