[21/08 à 15h] Clarence & Sarah

La chaleur devenait étouffante dans la villa et je tournais en rond depuis plus d'une heure maintenant, cherchant désespérément quoi faire. Aller dans la piscine était pratiquement impossible, beaucoup trop de monde en avait pris possession. Et je ne voulais pas rester dans un coin sans pouvoir bouger. Faire la sardine ce n'était vraiment pas pour moi. Quant à la plage ? Non, je n'avais pas envie de ça, je voulais changer un peu, faire quelque chose d'autre, mais quoi ? La patinoire, en voilà une bonne idée, ça faisait tellement longtemps que je n'avais pas chaussés des patins à glaces, autant en profiter. Je courais donc me changer, parce qu'un short pour faire de la patinoire, mauvaise idée. J'enfilais le premier slim qui me tombait sous la main et partit en direction du centre-ville. J'arrivais jusqu'à l'entrée de la patinoire, il n'y avait pratiquement personne, que du bonheur. C'est tout ce qui me fallait, un moment au calme. J'entrais et m'approchais de la dame distribuait les patins pour lui dire la taille qu'il me fallait. Elle parti quelques secondes et m'apportât la bonne taille, j'enlevais mes baskets et lui tendais avant d'aller m'asseoir et de mettre les fameux patins. Une fois 'prête' je sortis et me positionna sur l'entrée de la glace. Je mis quelques minutes avant de poser les deux pieds dessus, mais une fois ceci fait, je me sentais presque comme légère. Un vrai bonheur.

21 août ; &SARAH

Lors d'une promenade de routine tout à fait anodine, Clarence en avait profité pour explorer un peu plus les moindres boutiques et enseignes de Rollington. Même si le village paraissait petit mais accueillant, la diversité des services offerts était impressionnant. C'est pourquoi l'homme était resté cois quand il s'était arrêté devant de grandes lettres capitales qui désignait devant l'entrée: patinoire. La patinoire était un peu la foire pour un agoraphobe, un cauchemar en d'autres termes. Clay était un homme de terre qui aimait la nature, un homme d'eau qui aimait nager durant des heures mais certainement pas un amateur de glace. Sur la glace, il était comme un gosse: désespérément accroché au rebord parce qu'il n'était pas capable d'aligner plus de deux pas sans se retrouver les deux fesses par terre. C'était dans ce genre d'activités qu'il se sentait comme un gros pataud lourd qui n'esquissait que des pas maladroits. S'ennuyant en cet après-midi, il avait finalement décidé d'aller y faire un tour. Il n'y aurait personne à cette heure de la journée, c'était un bon moyen pour ne pas se ridiculiser devant tout le monde et offrir des images intéressantes pour les prochaines chroniqueuses sans pitié. Il avait mis son bonnet fétiche rouge en laine, qu'il affectionnait depuis plus de dix ans et pour cause, la personne qui lui avait offert avait été spéciale durant longtemps. Il faisait chaud dehors mais sitôt qu'il pénétra dans la patinoire, il comprit la nécessité de ne pas venir en short et tong. Il récupéra des patins à sa taille en échange de ses chaussures. « Vous soignez les pauvres pratiquants blessés ? » Dit-il avec un sourire charmeur avant de s'éclipser. Il fallait même faire bonne impression auprès de la ménagère qui suivrait le programme. Après les avoir enfilé, il se dirigea clopin-clopant vers la grande arène. Il ouvrit la petite porte pour entrer sur la glace quand une silhouette glissant avec légèreté passa devant ses yeux clairs. « La poisse. » Oui la poisse, il se retrouvait à quelques mètres d'une nana qu'il connaissait très douée pour les patins et également très douée pour se moquer de sa médiocrité en terme de patinage. Sur le moment, il songea à rebrousser chemin et se retourna donc pour s'éclipser. Pourvu qu'elle ne l'ait pas vu.

Retourner sur la patinoire était vraiment un bonheur, je ne me rappelais plus la dernière fois que j'avais fais du patin. Mais c'était toujours un plaisir à l'état pur. Mon moment de calme à moi ou je ne pense plus à rien, un moment où je peux juste être une fille normal, pas la Sarah avec ses problèmes. Non rien de tout ça. Les trois personnes qui étaient là avant moi avait entre temps quitté la patinoire, du coup, il ne restait plus que moi. Moi et mon calme, enfin presque. Je passais devant la porte et m'arrêta quelques mètres plus loin. Je regardais la personne qui venait de faire son entrée et leva les yeux au ciel. « Tu te fais du mal Clay. Pourquoi t'entêter à vouloir faire du patin à glace ? » Je m'approchais de lui et lui fis un sourire. Je n'avais pas l'intention de me moquer de lui, loin de là, après tout, nous allions surement pouvoir partager ce moment ensemble ? Et puis l'idée ne me déplaisait pas du tout. Je lui tendis la main et lui laissa la place d'entrer. « Aller vient, il n'y a que nous de toute façon. » Et ce n'était pas plus mal. Clay n'était tellement pas dans son élément, que ça me surprenait vraiment de le voir ici. « Alors qu'est-ce que tu fais là ? Tu t'es perdu ou un truc dans le genre ? » Je lui fis un petit sourire moqueur, nous savions tous les deux qu'il n'était pas à l'aise sur la glace. Nous avions déjà tenté l'expérience, bon d'accord c'était il y a très longtemps, mais quand même. Après quelques gamelles nous avions failli nous retrouver à l'hôpital et après ça c'était fini, j'avais décidé de ne plus retenter l'expérience de la patinoire avec Clay. Mais aujourd'hui c'était différent...

21 août ; &SARAH

Clarence avait beau être doué dans certains domaines qui dépassaient la plupart des américains normaux des grandes métropoles, il était également médiocre dans pas mal de choses normales de la vie. Il ne savait pas patiner, il conduisait toujours bien trop vite, il avait un sens de la mode tout à fait à lui, il détestait les taxis et les comédies de Broadway. En gros, on se demandait parfois comment il avait pu grandir en ces lieux. Mais il aspirait pas dessus tout aux défis et lorsqu'apprendre quelque chose d'inconnu relevait du challenge, il répondait toujours présent avec une grande détermination. Et le patinage faisait partie de sa liste de choses à faire avant d'être un vieux crouton. The Werewolf Game avait même un but éducatif au final, mais quelle émission de génie ! Cependant, quand il aperçut Sarah évoluer sur la glace en patineuse aguerrie qu'elle était, toute sa motivation disparut en fumée. Il y avait déjà eu des tentatives avec elle pour le soutenir mais ça finissait toujours en rigolade de sa part et de chutes ridicules de la sienne. Au final, il avait abandonné toute idée d'y aller avec la jeune femme. Et aujourd'hui n'allait pas déroger à la règle, c'était hors de question qu'il se donne en spectacle après dix ans sans se voir qui plus est. Clay devait l'impressionner et non le contraire. Il fit volte-face mais elle l'attrapa bien trop vite. « Justement, je crois que je vais abandonner. » Dit-il avec une moue d'enfant renfrognée. Il était déjà vexé avant même qu'elle ne l'ait vu boiter sur la glace. Sarah lui tendit la main pour l'aider à entrer sur le terrain mais il la refusa en bloc et posa un pied puis l'autre tout en s'agrippant désespérément au rebord. Il avança de quelques pas pour s'éloigner d'elle, toujours dans l'optique de faire le gamin qui n'avait pas besoin d'elle. « J'étais venu pour entrainer mes talents de patineur mais je vois que tu ne crois pas en moi alors je me garderai de te les montrer. » Clarence lui tourna le dos puis essaya de faire quelques pas de plus. Mais bien vite son pied droit dérapa et il parvint de justesse à ne pas commettre sa première chute. Vu le rire derrière lui, Sarah n'en perdait pas une miette. « Bon tu me la donnes cette main ! »

Je ne me déclarais pas reine du patin à glace, seulement c'est vrai que les cours que mon père m'avais fait prendre plus petite, m'avait en quelque sorte pas mal aidé. Il m'avait tellement poussé à faire des concours et tout le tralala que ça m'avait complètement dégouté et du jour au lendemain j'avais tout plaqué, comme toujours. Après ça mon père avait compris que me pousser à faire ce que lui voulait, ce n'était vraiment pas une bonne chose et puis comme il ne voulait pas que je me mette en colère, il avait abandonné toute idée de faire quoi que ce soit avec moi. Mais ça ne m'a jamais dérangé. Aujourd'hui je retrouvais le bonheur d'être sur la glace avec en prime la compagnie de Clay, que demander de plus ? « Non Clay, reste, s'il te plais. » Cette demande aurait pu être interprété comme une demande désespérée et en quelque sorte ça l'était. Je ne voulais pas qu'il me laisse toute seule. Et j'avais fait un effort considérable pour lui demander de rester alors si il refusait...Je préférais ne pas y penser. « Clay, arrête. Je suis sûre qu'avec le temps tu t'es amélioré, alors va y montre moi et je te promets que je ne me moquerais pas de toi. » Bon c'est vrai que c'était une bien grosse promesse pour un petit bout de femme comme moi, mais autant essayer. Tant que je le pouvais. Et je ne le pus, pas très longtemps. Il failli tomber et j'étouffais un rire. « Désolé, je ne rigolerais plus. Tiens » Je lui tendais la main et lui fis un sourire. « Et sinon, tu vas bien ? On a pas trop l'occasion de parler en ce moment. »

21 août ; &SARAH

A l'époque où ils étaient ensemble, Sarah et Clarence avaient partagé beaucoup de choses. Toujours collés l'un à l'autre comme aimaient à le dire leurs familles, ils avaient eu l'occasion d'explorer pleins d'endroits, de vivre pleins d'aventures et de faire pleins de bêtises. Il fallait dire que Clay était dans son époque refus d'autorité et que Sarah vivait certainement sa crise d'adolescence. La patinoire faisait donc partie de ces souvenirs inoubliables qui avaient tourné en un fiasco plutôt amusant pour l'un plus que pour l'autre. Il avait des faiblesses plus ou moins supportables, plus ou moins dissimulées et Sarah avait été la seule à qui il n'avait pas peur de les montrer. Aujourd'hui c'était une toute autre histoire. Les dix années de silence, l'orgueil grandissant et la carapace qu'il s'était forgée pour les besoins de son quotidien difficile faisaient qu'il avait plus de mal à se dévoiler désormais. Lorsqu'elle lui demanda de rester avec elle, il se retourna pour la fixer, incrédule Qu'est-ce qu'il lui prenait ? Depuis quand retenait-elle les gens ? Ca n'était pourtant pas dans ses habitudes. Finalement, il céda à sa demande mais s'éloigna le plus possible d'elle pour tenter tant bien que mal d'avancer tout seul sur la glace. Elle avait beau promettre de ne pas se moquer, il n'était pas dupe. « Et moi je suis le président des Etats-Unis. » Clay essaya d'occulter sa présence pour mieux se concentrer sur ses pas mais rien n'y fit, il empêcha de justesse une nouvelle chute. Il était pourtant doué en rollers mais les patins à glace c'était une hantise qui se moquait ouvertement de lui en plus ! Après avoir ri de lui, elle finit par lui tendre la main et Clarence la prit brusquement sans quitter le sol des yeux. Il esquissa quelques pas bancals jusqu'à elle tandis qu'elle l'interrogeait. « Ca va plutôt bien. Et toi alors ? Je suis soulagé que ni toi ni moi ne soyons nominés d'office pour cette semaine. » Il risque un regard vers elle juste pour lui sourire. C'était vrai qu'ils n'avaient pas trop l'occasion de se parler mais c'était bien parce qu'elle préférait passer ses journées avec d'autres personnes mais ça... Il se garda bien de le faire remarquer.

Les choses étaient plutôt étrange entre nous aujourd'hui alors que dix ans c'est quoi ? Oui, beaucoup de temps gâché. Mais nous avions fait nos choix maintenant. Mais il est vrai que j'avais vraiment mal vécu le départ de Clay, parce que je n'avais pas seulement perdu mon premier amour, non, il y avait aussi mon meilleur ami qui me laissait et ça, ce fut le plus dur à encaisser. Et puis comme on dit..."le temps guérit toutes les blessures", enfin j'aimais le croire et m'en persuader, parce que malgré tout ça faisait toujours mal. Mais ça jamais je ne lui dirais, je possédais bien trop de fierté. Et nous avions tous les deux ce foutu orgueil et dans le genre tête de mule, on ne fait pas mieux que nous. « Quoi ? Depuis quand ? J'ai pas voté pour toi moi. Tu aurais quand même pu me prévenir. » Je me mis à rire et le laissais évoluer sur la glace à son rythme, je sais à quel point ce n'est pas facile, surtout quand quelqu'un se "moque" gentiment de vous. Et puis je connais Clay et sa patience, donc il valait mieux pour moi que je ne dise rien, sinon il s'énerverait, prendrait la mouche et quitterait sans doute la patinoire et franchement ce n'était pas du tout ce que je voulais. Je le laissais donc faire les choses à sa façon. Lorsqu'il m'attrapa la main je lui fis une petite grimace, c'est qu'il a de la force quand même. « Doucement, ne te précipite pas, ça ne te fera que tomber plus vite. » Je me frottais doucement la main et lui fit un petit sourire. « Oui, c'est une bonne chose. » C'est vrai que nous avons eu de la chance, enfin...Si Justin & Clay l'avait voulu je serais sur le banc des nominés aujourd'hui. Mais après ce que Clay avait fait pour moi, je ne pouvais pas à mon tour le nominer. « C'est cool, on va avoir ce moment à nous, pour discuter un peu. »

21 août ; &SARAH

Se parler était presque devenu un redoutable challenge. Sarah et Clarence étaient enfermés dans cette spirale infernale des relations qui s'étaient mal terminées et qui laissaient toujours une trace indélébile. Même si on aimait à dire qu'on avait tourné la page. Après dix années, Clarence avait bien été obligé d'oublier ces bons moments, d'occulter les mauvais. Mais maintenant qu'elle était de nouveau face à lui, il avait l'amère sensation d'être un piètre joueur qui ne pouvait plus rien lui cacher. Il ne voulait plus lui montrer ses faiblesses, il était un trentenaire avec une carrière épanouissante, il n'était plus l'homme qu'elle avait connu et aimé. Devenu trop secret, resté trop engagé dans ces causes utopiques. Leur plaisanterie quant à ce qu'il ne soit président était pourtant le plus doux des fantasmes. Il n'aurait pas eu besoin de participer à ce foutu jeu qui commençaient à le rendre fou s'il avait été président. Il aurait mis en place des mesures et des règles qui viseraient enfin à faire du monde entier un peuple dédié à la nature qui l'accueillait et qui la respectait. Tant de rêveries gamines qu'il faisait là. En attendant son principal objectif de la journée était d'aligner plus de dix pas sans faire corps à corps avec le sol glacé. Sarah lui prodiguait quelques conseils mais il ne parvenait pas à ralentir la cadence: il avait toujours eu besoin d'aller vite, de foncer tête baissée et de récolter les conséquences après. « J'ose espérer que tu n'es pas le loup tu sais, je n'arrête pas de penser à ce que j'ai raté dans cette foutue salle. » Son passé avec Sarah devenait un handicap dans le jeu. Un handicap qu'il n'espérait pas vain. Tirant sur la main de la jeune femme, il l'incita à patiner un peu pour qu'il puisse se faire entrainer et la suivre. Son autre bras était légèrement tendu en l'air pour garder l'équilibre, ce qui réussissait bien pour l'instant. « Tu as raison. Il faut qu'on se briefe de temps en temps à propos de l'avancée du jeu. Et puis maintenant que je t'ai, je ne te lâche plus. » Il quitta ses pieds des yeux pour le regard de la belle. « Tu crois qu'après l'émission on pourrait rester en contact ? »

Tout ça devenait trop bizarre, même pour moi qui suit la reine des bizarreries en tout genre. Nous étions là depuis une pauvre semaine et je me retrouvais déjà avec la tête à l'envers, quelle belle blague. C'est vrai que depuis le début du jeu j'avais laissé Clay de côté au profit de Justin, mais je savais pourquoi je faisais ça. Parce-que malgré le caractère merdique que je pouvais me trimbaler, aujourd'hui mon pauvre petit coeur était mit à l'épreuve et comment gérer tout ça ? « Je ne peux rien te dire, mais suis ton coeur. Et fais-moi confiance. ça ne t'a jamais porté préjudice jusque là ? » Il pouvait me faire confiance, est-ce qu'il le ferait ça, c'était une autre histoire. Je savais que tout ça nous mènerait sans doute à notre perte ! Cette relation tellement complexe, comment dire aux autres où nous en étions lorsque même nous ne le savions pas ? Je le savais, Clay serait ma faiblesse dans le jeu et pourtant je ne pouvais me résoudre à faire quoi que ce soit contre lui. Malgré tout je pense que j'avais besoin de lui ici. Je le regardais évoluer doucement sur ses patins et j'étais assez fière de lui. « Tu te débrouille pas si mal tout compte fait. » "Et puis maintenant que je t'ai, je ne te lâche plus." Sa phrase résonnait dans ma tête, qu'est-ce qu'il voulait dire par là ? Je lui fis un petit sourire et haussa les épaules. « Qu'est-ce que ça veut dire exactement ? » Je ne savais pas où il voulait en venir et j'avais hâte de connaitre sa réponse. « Bien sûr, nous n'avons plus de vraies raisons de nous quitter maintenant. » Son regard se plongeât dans le mien et en une seconde je trébuchais pour nous faire tomber tous les deux. Bravo, du grand Sarah dans toute sa splendeur. Sous le choc j'avais fermé les yeux. Je les ouvrais doucement pour me rendre compte que je n'étais pas du tout sur la glace, mais plutôt allongé sur Clay. Je le regardais et lui fis un petit sourire. « Désolé. »

21 août ; &SARAH

Sarah tentait de lui faire comprendre qu'elle était digne de confiance. Etait-ce une confession à demi-mots quant à son rôle dans la partie ou bien était-ce une réponse si sincère qu'elle en avait oublié l'aspect stratégique du jeu ? Clarence aurait aimé se jeter à corps perdu dans cette assurance qu'il avait une alliée indéfectible dans la maison mais il n'avait jamais été aussi peu sûr de lui qu'en cette semaine. « Pas faux. » Se contenta-t-il de répondre, soucieux. Ces sourcils étaient froncés depuis un moment déjà, rabaissant son bonnet rouge sur ses yeux, signe qu'il était en pleine réflexion intense. C'était compliqué, trop compliqué de réapprendre à vivre avec Sarah dans ces conditions. Parfois il avait envie de l'embarquer et de fuir Rollington, tant pis pour l'argent, il avait au moins récupéré une personne importante dans sa vie. Mais ça n'était pas possible et il se rappelait Yellowstone chaque fois qu'il était sur le point de craquer. Ils avaient beau faire du patins comme dans une journée normale, plus rien n'était normal ici. D'ailleurs Sarah se risqua à lui faire un compliment et Clay répondit, la voix bougonne: « Arrête de te moquer, je décolle même pas le pied du sol au moins je risque pas de déraper. » C'était un cauchemar et plus il avançait plus il se demandait pourquoi il s'était donné l'espoir de pouvoir réussir un jour à patiner. Ca ne lui servirait à rien dans son parc, quand il neigeait l'hiver, c'était motoneige et raquettes. Il eut le malheur de parler un peu trop et il ne fallut pas longtemps à son ex pour relever l’ambiguïté. Pris au piège, il haussa les épaules pour feindre l'indifférence et déclara: « Si tu me lâches là je tombe non ? Alors autant ne pas te lâcher. Et puis je sais que tu es une redoutable joueuse, tu n'aimes pas perdre. » Il lui adressa un faible sourire puis un clin d'oeil complice. Combien de fois s'étaient-ils embrouillés parce que ni l'un ni l'autre n'aimait perdre ? Avançant un peu, elle le rassura quant à leur relation à l'extérieur. C'était déjà une chose de gagné. Soudain Sarah fit un pas de travers certainement volontaire car il mena tous les deux à les faire tomber. Tant bien que mal Clay essaya de rester debout mais peine perdue, le bruit d'une glissade résonna dans l'énorme pièce. Elle lui était tombée dessus et il avait tout juste eu le réflexe de la retenir avant qu'elle ne lui coupe le souffle. Il la toisa, perplexe qu'elle soit la responsable de tout ça puis quand elle s'excusa, Clarence finit par laisser retomber sa tête sur la glace avant d'éclater de rire. En fait, il avait terriblement mal au dos mais c'était un garde-chasse, il n'allait pas pleurnicher pour un petit bobo. « Tu plaisantes là ? Tu veux notre mort avant même qu'on gagne cette émission ? »

Je savais qu'il ne pouvait pas me faire confiance comme ça les yeux fermer, parce-que là nous n'étions pas dans la "vraie vie", mais dans un jeu où tout le monde mens, alors à qui faire confiance ? Moi-même je n'étais sûre de rien, ça se trouve je faisais confiance à des gens alors que je ne devrais pas, mais si on commence à penser comme ça, on s'en sort plus. Trop casse tête tout ça. « Je ne te demande pas de mettre de côté le jeu à cause de moi, je ne veux pas que tu passe à côté de ton aventure. Je sais que tu gardes un goût amère du prime, je te connais assez pour l'avoir deviné et promet moi que la prochaine fois...Tu jouera pour toi, tu étais là pour ça au début, n'oublie pas ton objectif à cause de moi. » Je ne voulais pas qu'on s'éloigne à cause du jeu, seulement il fallait être lucide au bout d'un moment, notre relation quelque soit elle, serait un frein pour nous. Et ça je ne pouvais pas l'accepter, car si Clay était ici, dans ce jeu ce n'était surement pas pour rien, il n'aurait pas quitté sa vie juste pour le plaisir de revenir en ville. « Okay je laisse tomber, Monsieur ronchon. » Le fait qu'il osa me "mentir" sur la réponse me vexa légèrement, soit il me cachait quelque chose, soit il avait dit ça dans le vent, seulement je connaissais assez le beau blond pour savoir qu'il ne disait jamais rien dans le vent. Et que sa réponse était bidon. Mais c'est pas grave j'y reviendrais plus tard. Une fois sur la terre ferme, lorsqu'il sera plus à l'aise dans ses pompes. « Ouais c'est ça, je te lâche et tu tombes, ça serait dommage quand même. Ne pas aimer perdre ne fait pas de moi une redoutable joueuse, tu n'aimes pas perdre non plus...» Je ne voulais pas dire par là qu'il n'était pas un redoutable joueur loin de là, mais j'avais sans doute quelque chose de plus. Aucune indulgence. Son regard me perturba et je nous fis tomber. ça ne m'étais pas arrivé depuis bien des années. Il n'y avait que Clay pour me perturber comme ça. « Si j'avais voulu te tuer, tu serais déjà mort joli coeur. » Je lui fis un petit sourire puis me redressa pour m'asseoir en face de lui. « Je ne t’ai pas fait mal ? » Bah oui, je ne voulais pas qu'il se soit blessé quand même, aucun intérêt. Je le regardais et baissa les yeux. Heureusement qu'il n'y avait que nous. « On en est où tous les deux ? Ne me dis pas "bah on est des ex", parce que je sais qu'il n'y a pas que ça Clay et j'arrive pas à savoir ce qu'il y a entre nous...» Il fallait qu'on en parle, j'aurais aimé un autre moment, un autre contexte, mais c'était sorti alors autant mettre les choses au clair une bonne fois pour toute.

21 août ; &SARAH

Sarah avait bien raison de lui demander de ne pas prendre compte d'elle dans ses décisions qui concernaient le jeu. Clarence était quelqu'un de dévoué à la cause des autres, des animaux mais aussi de ses proches. A maintes reprises, il avait fait passé les autres avant lui au dépend de son propre épanouissement. Pendant longtemps, il avait suivi la voie tracée par papa maman sans penser à ses propres ambitions. Aujourd'hui il travaillait pour son compte mais il demeurait quelqu'un de trop loyal pour ne pas se nuire à lui-même. C'est pour ça qu'il avait souhaité participé à ce jeu: ça l'obligeait à ne penser qu'à lui et ses objectifs propres. Même si Sarah venait de redistribuer les cartes à sa manière, elle avait raison de lui rappeler de ne pas s'occuper de son sort avant le sien. « Tu sais ce qu'il en est, Sarah. Je vais faire de mon mieux, je suis là pour moi avant tout. Mais je ne t'écarterai pas du jeu pour quelques centimes. » Peut-être qu'au fond Sarah avait plus besoin de la somme destinée au gagnant que lui ? Que savait-il de sa vie d'aujourd'hui ? Il n'avait même pas osé lui demander, même pas osé l'interroger sur son avenir et sur ce qu'elle devenait. Clarence était trop à l'aise, Clarence parlait trop et quand elle lui réclamait des explications sur ses paroles confuses, il ne trouva que le seul moyen de détourner le sujet. Il ne voulait pas retourner dans cette spirale qu'il avait vécu avec elle. Qu'elle redevienne sa force comme sa faiblesse, il n'avait plus les moyens de se tromper à trente ans. Et alors qu'ils discutaient tranquillement, ils finirent tous les deux sur la glace en moins de temps qu'il ne fallut pour le dire. Malgré les rires, il savait que la situation ne tournait plus autour du patin. Tout se compliquait à nouveau. « Je crois que tu vas me devoir de nouvelles vertèbres mais je te fais cadeau de mon coccyx. » Dit-il en souriant pour minimiser la situation. Y'avait-il un kiné dans la maison ? Ca serait une forte aubaine. Le blond se redressa à son tour puis s'assit près d'elle. Puis enfin les questions fatidiques sortirent de sa bouche. Clay la fixait comme s'il ne réussissait pas à croire qu'ils doutaient sur les mêmes choses. Ne rien dévoiler, faire l'ours fort que rien n'atteignait pas même la grâce de la colombe. Quitte à la décevoir mais c'était pour mieux ne pas re-souffrir. « Je sais pas Sarah. Je suppose que nous restons aussi différents.. Comme avant. » Il la regarda avec le plus de contrôle possible puis saisit son nez entre ses deux doigts en geste amical avant de quitter son visage. Et puis il y avait cette discussion avec Justin... « Je crois que c'est toi qui la réponse. J'ai cru comprendre que tu te rapprochais d'un candidat. Ne te soucie pas de moi, Sarah. »

Je lui avais été reconnaissante de m'avoir sauvé la mise au prime, mais là, plus nous allions avancer dans le jeu, plus les choses allaient sans aucun doute se corser, donc nous devions plus ou moins jouer pour nous. Même si je ferais tout mon possible pour qu'il reste le plus longtemps possible, l'un n'empêchant surement pas l'autre. J'en savais trop rien, nous étions seulement au début de la deuxième semaines après tout. Le temps fera les choses, comme toujours. « Je sais Clay, tout comme je ne te planterais pas un couteau dans le dos. Seulement faire de ton mieux n'est pas assez. Même si ça me coute vraiment de te dire ça, il faut que tu fasses comme si j'étais n'importe quelles filles de ce jeu. » Je ne voulais pas que ça nous éloigne, loin de là, mais durant les missions ou autres il devait penser à lui avant tout et essayer de gagner. Qu'au moins un de nous aille jusqu'au bout ! « C'est horrible j'ai toujours cette sensation qu'il y a des non dit entre nous. C'est juste une impression ? » Nous avions besoin de cette conversation de s'ouvrir enfin l'un à l'autre sur nos ressentit, nos réels sentiments, seulement parler n'était pas vraiment notre fort. Nous avons toujours eu du mal à communiquer sans se prendre la tête, je pense que ça a été pour beaucoup dans notre éloignement, ça et tout le reste. Beaucoup de petites choses pour au final pas grand-chose. « Je suis désolé, vraiment. En même temps tu m'as complètement désorienté avec ton regard là ! » Il fallait bien que je trouve un coupable quand même, après tout, je n'allais pas endosser toute la responsabilité de la chose. « Je te ferais un massage pour me faire pardonner. » Je ne savais pas si c'était une bonne idée, mais je l'avais mis dans cet état alors autant me faire pardonner de quelque manière que ce soit. Et là d'un coup tout bouillonna dans ma tête, je me mordais la lèvre histoire de me calmer. « Comment tu peux savoir ça ? Dix ans ont passé Clay, dix longues années sans que nous aillions des nouvelles de l'autre. Comment peux-tu savoir que nous sommes toujours aussi différents ? » Je soupirais et me levais sortant de la glace. « Non tu sais quoi tu as raison, nous sommes encore trop différents. Moi je vis dans le vrai monde. Avec ses merdes et sa foutu réalité. » Et voilà, aussi simplement que ça je m'énervais, pourquoi changer les bonnes habitudes ? « Comment tu oses dire ça ? Qu'est-ce que tu veux que je fasse Clay ? Que j'attende gentiment que tu remarques que j'ai grandis, que je ne suis plus une gamine et que cette foutu cicatrice n'est toujours pas refermé ? » Je laissais tomber mes patins par terre et me posait sur un banc lui tournant le dos.

21 août ; &SARAH

La discussion tournait au sérieux et c'était bien ce que craignait Clarence. Quand ils étaient tous les deux, mieux valait que l'atmosphère soit légère et détendue car quand ils s'attaquaient à des choses réfléchies et profondes, ça ne présageait jamais rien de bon. Agacé par ces recommandations, il lâcha d'un ton monocorde. « Oui t'as raison, je ferai tout comme tu as dit. Peut-être que je devrais même t'ignorer pour que je puisse avancer dans le jeu. Le pognon c'est primordial pour moi. » Il détestait qu'on lui dise quoi faire surtout quand c'était pour lui conseiller d'être plus égoïste. Il ne se laissait pas marcher sur les pieds pour autant, il n'était pas bonne poire non plus. Etait-ce ce qu'elle insinuait ? Clay n'était pas du genre susceptible sauf lorsque les réflexions désobligeantes venaient de ses proches, là il n'acceptait jamais la défaite. Oui, elle avait raison. Il y avait toujours des non-dits entre eux mais c'était certainement par souci de préserver l'égo de l'autre. Les disputes étaient si vite commencées dès que l'un haussait le ton de sa voix qu'ils préféraient se taire sur certains sujets pour éviter de se déchirer une nouvelle fois. D'autant plus qu'ils n'étaient pas réellement seuls ici, le moindre fait et geste était filmé et sur le coup, Clarence ne supportait pas que tout ça se fasse dans de telles conditions. Sarah lui proposa un massage pour se faire pardonner de l'avoir fait tombé et il se pencha légèrement vers elle pour dire: « J'espère que tu t'es améliorée en cette matière. » Elle n'était pas mauvaise pour les massages juste trop douce. Quand on avait une carrure telle que le garde-chasse, il fallait savoir y mettre de la force et ne pas hésiter à faire mal sinon il ne sentait presque rien. Ce qui n'était pas le cas. Puis les choses s'envenimèrent quand la question fatidique résonna dans la patinoire. Clay s'efforça d'être le plus neutre possible, sans aucune émotion sur le visage mais peine perdue. Sarah s'énerva. Il restait planté là, les fesses mouillées sur la glace quand elle sortit du terrain. Avait-elle oublié qu'il n'était pas le genre d'homme à aller chercher les petites femmes vexées ? Il avait trop d'orgueil pour ça. « Quoique tu penses, je vis aussi dans le vrai monde. Je ne cours pas toute la journée à travers les fleurs et je ne me roule pas dans l'herbe avec les petits lapins. » Il n'avait jamais accepté qu'on puisse critiquer son mode de vie. Elle lui tourna le dos comme une vulgaire gamine qui boudait. Clay détestait ça. Se relevant tant bien que mal pour tenir debout, il fit ce qu'il put pour rejoindre les rebords de la patinoire sans se casser la gueule à nouveau. Mais il ne sortit pas pour la rejoindre. « Je remarque que tu as grandi Sarah, je remarque aussi vu tes fréquentations que tu as d'autres attentes. Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? Que je t'ai attendu pendant 10 ans qu'on se retrouve dans un jeu merdique ? Et bah non, j'ai évolué, je suis toujours dans ce métier qui te dégoûte tant et j'ai appris à vivre avec et sans toi. J'ai pas le temps d'attendre que tu te sois remise de tout ça. » Jaloux Clay, jamais.

Nous n'avons jamais été doués pour les conversations sérieuses, rien à faire ça a toujours tourné au pugilat. Que faire pour changer ça ? Rien malheureusement, nos caractère bien trop différent ne nous aidais pas. Pourtant nous avons réussi à rester plus au moins proches et puis si on enlève les prises de têtes, notre relation n'avait pas été si mal. Seulement aujourd'hui les choses avaient changé, mais nos caractères restaient malheureusement intact. « C'est pas ce que je voulais dire et tu le sais très bien. » Je ne voulais pas qu'il me laisse au détriment de l'argent, seulement qu'il pense un peu plus à lui, mais comme toujours j'avais été maladroite dans mes propos. « Je veux juste que...Laisse tomber ! » On arriverait pas à s'entendre là-dessus, un point de plus pour lequel nous nous prendrons la tête. Après tout, nous n'étions plus à ça près. Je ne supportais pas plus que lui toute cette situation, seulement ça devenait très pesant. Et puis avoir cette conversation ici en sachant que la moitié serait surement montrée au prime, ne m'intéressait pas non plus. Alors, quoi ? On devait juste se taire et attendre d'être hors-jeu pour pouvoir s'expliquer ? C'était une solution parmi tant d'autre. Quand la question du massage arriva sur le tapis, je n’eus d'autre réflexe que de lever les yeux au ciel. « J'ai plus de force qu'il y a dix ans. Tu n'as rien à craindre je pourrais te le faire ce massage. » Et puis tout s'emballa très vite, je m'énervais comme toujours, pourquoi je n'arrivais donc pas à parler calmement avec lui ? Pourquoi fallait il que toutes nos conversations tournent au drame ? Le mélodramatique, ce n'était plus mon truc depuis bien longtemps et là je lui prouvais que finalement il avait raison, je n'avais pas plus grandis que ça. « Non sans blague ? » Je savais très bien qu'il ne vivait pas dans un monde de bisounours et ce n'était pas vraiment ce que j'avais voulu dire par "Moi je vis dans le vrai monde. Avec ses merdes et sa foutu réalité." Mais de toute façon à quoi bon me justifier ? ça ne servirait à rien. « Qu'est-ce-que tu veux dire par "Je remarque aussi vu tes fréquentations que tu as d'autres attentes" ? » Je me tournais vers lui et plongeât mon regard dans le sien, je me calmais doucement et compris où il voulait venir. « Tu es jaloux de Justin ? » Je savais qu'il trouverait encore une parade pour passer à côté de la question, mais cette fois je ne le laisserais pas faire. « Tu était où lorsque j'ai eu besoin de toi ? » C'était une question rhétorique, plus pour moi que pour lui au final ! Comment j'aurais pu lui dire ce que mon père m'avait fait subir après son départ ? Comment lui faire comprendre que j'étais juste une femme blessée ?

21 août ; &SARAH

Laisser tomber demeurait encore la meilleure des solutions. Clarence ne fuyait pas les conflits, il évitait plutôt les conséquences. Il avait l'impression qu'ils étaient en trai nde se donner en spectacle, que tôt ou tard les spectateurs curieux se délecteraient de cette petite entrevue qui avait mal tourné. Il regrettait à présent d'avoir mis les pieds ici si seulement il avait su qu'il y trouverait Sarah sans doute aurait-il rebroussé chemin en attendant de la croiser avec un peu plus de monde ou dans des conditions moins intimistes. Ca n'aurait fait que repousser l’échéance mais Clay n'était pas prêt à revivre à nouveau ce genre de tensions. Il était parfaitement épanoui dans sa vie aujourd'hui et le jeu lui permettait seulement d'acquérir encore plus de moyens et de bonheur. Il n'était pas là pour offrir son passé en pâture et encore moins les différences et les similitudes qui avaient toujours éloigné les deux jeunes gens. L'évocation du massage le laissa perplexe. C'était une assez bonne représentation de leur changement au fil des années: au fur et à mesure qu'elle s'endurcissait, lui n'avait cessé de garder cette enveloppe puissante et intimidante. Il doutait cependant qu'elle soit désormais capable de s'y attaquer sans souffrir comme autrefois. Sarah faisait preuve d'ironie quand ils évoquaient la propre réalité de Clay, ce qui ne manquait pas de l'irriter encore plus. Alors pourquoi passait-elle son temps à évoquer son monde, comme si celui du garde-forestier était trop spécial pour ne pas faire partie du même que le sien. Tout ceci était ridicule et déjà il songeait à la planter là et partir pour mieux éviter les prochaines paroles. Mais elle avait déjà trop vite compris. Quand elle lui demanda s'il était jaloux de Justin, Clarence ne put s'empêcher de rire jaune mais à voix haute. Il reprit son sérieux et la toisa de son regard incisif et noir avant de lâcher, presque sournoisement: « Comment je pourrais être jaloux ? Je lui ai même dit que la voix était libre, quelques minutes de plus et je lui donnais quelques conseils pour t'emballer. » Quand il devenait presque vulgaire c'est que plus rien n'allait. A son tour, il sortit de la glace et retira ses foutues chaussures qui lui faisaient mal aux pieds en plus d'être instables. Il ne pouvait pas faire semblant d'être un autre. Sarah osa l'interroger sur son absence. Se moquait-elle de lui ? « Quand tu as eu besoin de moi hein ? Si jeune, si florissante, tu n'avais besoin de personne, Sarah. N'essaie pas de me faire culpabiliser d'avoir trouvé mon avenir. » Il alla déposer ses patins et récupérer ses chaussures. Qu'il parte au plus vite...

Je ne devais plus prendre les choses autant à coeur, j'avais pourtant réussis au fil du temps à me forger une carapace infaillible. Enfin c'est ce que je pensais jusque là, mais il faut croire qu'en présence de Clay je n'étais plus du tout rationnelle. Quelle plaie. Je ne pouvais plus me laisser aller comme avant et me mettre en colère contre lui à chaque petite contrariété. Nous n'étions pas là pour ça après tout. Mais de toute évidence les hostilités étaient lancés alors bon, soyons fous. « Tu lui as dit quoi ? Non mais t'es sérieux là ? Je suis quoi moi...Un vulgaire bout de viande que vous vous refilez ? » Sa phrase m'avait plus que vexé, j'étais complétement blessé et si je n'étais pas si petite je lui en aurais surement collé une, seulement il fait trois têtes de plus que moi et sa carrure reste quand même imposante...Donc on va éviter le drame. « J'en reviens pas . » J'étais vraiment déçu pour le coup, l'entendre parler comme ça de moi. ça m'étais juste inconcevable et pourtant, comme quoi tout arrive. Mais là, il me poussait réellement à bout. Je ne voulais pas taper ma petite crise devant les caméras, alors, je regardais autour de nous et vis des toilettes un peu plus loin. Je lui attrapais le bras et le tirais jusqu'à l'intérieur, au moins ici, ni micros, ni caméras. Je ne voulais le faire culpabilisé en rien, seulement il ne savait rien de moi, rien de ce qui m'était arrivé ses dix dernières années. « Alors, c'est vraiment ce que tu crois Clay ? Que je n'avais besoin de personne ? » Je me plaçais devant la porte de façon à être sûre qu'il ne sorte pas, nous étions arrivés à un point de non retour, l'affrontement était de mise et enfin j'allais lui dire la vérité, lui dire ce que jamais je n'aurais pensé lui dire un jour. « L'année de ton départ, mon frère est partit pour l'armée, je suis resté seule avec mon père et il n'a rien trouvé de mieux que de passer ses putins de nerfs d'alcoolique sur moi. Après ça, j'ai pris pas mal de substance illicite, j'ai fait deux overdoses, mon père a failli me tuer et malgré tout ça j'ai trouvé le moyen de penser que tout aurait été différent si tu étais resté avec moi. » J'ouvrais la porte et m'écartais de lui. « Tu as raison Clay, je n'avais besoin de personne. » Au même moment un combat intérieur se faisait en moi pour éviter à mes larmes de couler, je ne pouvais pas pleurer devant lui, ça serait juste la catastrophe de trop. Et puis pleurer devant quelqu'un ? Non, jamais !

21 août ; &SARAH

La colère envahissait Clarence, ses mots dépassaient donc sa pensée. Rien que pour se défendre lors d'une dispute, il était capable de débiter les pires horreurs pour peu que ça fasse mal. Bien sûr il regrettait toujours par la suite mais très rarement il s'en était excusé. Ca faisait malheureusement parti des inconvénients à connaitre Clay, il n'hésitait jamais à mettre les pieds dans le plat et à dire les quatre vérités même si elles étaient blessantes. En l'occurrence, ça n'était pas réel. Sarah n'était pas un bout de viande, ils ne s'étaient pas disputé le bout de gras avec Justin. Il avait simplement expliqué qu'elle était libre de ses choix et que Justin n'empiétait sur rien mais ça il se garda bien de le dire. Il se tut aussi sur le fait que ça l'avait énervé d'apprendre que quelqu'un était sur le coup. C'était plus facile de se faire passer pour le goujat. « Tu sais bien que je n'ai pas dit ça comme ça. Il m'a parlé de toi qu'est-ce que tu voulais que je fasse, l'ignorer ? » Ca ne servait à rien d'essayer d'en rajouter, Sarah était persuadée qu'il l'avait traité de cette façon désormais. Il faudrait qu'elle parle à Justin pour qu'elle comprenne que jamais ils n'avaient tenu de tels propos mais pour l'heure, il était bon pour une gifle bien sentie. Mais elle se retint semble-t-il, ils savaient pourtant tous les deux qu'elle n'acceptait jamais le manque de respect. A moins qu'elle n'attendait d'être à l'abri des caméras, ce qui se confirma quand elle l'entraina aux toilettes, seul endroit de la patinoire qui n'était pas épié. Ca allait jaser sur eux mais que pouvait-il bien y faire, c'était déjà le cas au terme de la première semaine alors. Sarah se posta devant la sortie pour bien être sûr qu'il ne prendrait pas la fuite. Mais il resterait là, si elle voulait mettre les choses à plat très bien mais qu'elle ne s'étonne pas d'être vexée par la suite. Agité d'être enfermé là-dedans face à ses craintes et ses remontrances, Clarence fourra ses mains dans ses poches en guise de protestation. Qu'elle parle, il allait l'écouter. Et d'ailleurs elle vida son sac. Peut-être trop. Le blond reçut comme un coup de massue sur la tête. Elle avait subi tout ça durant son absence...? Clay eut d'abord envie de la prendre dans ses bras avant de vouloir fuir pour de bon cette fois-ci. Elle acheva son récit par une ironie qui ne manqua pas d'atteindre l'homme. « Je suis désolé, Sarah. » Que pouvait-il dire de plus ? Il se sentait idiot d'avoir manqué tout ça, de ne pas avoir été là pour l'aider à faire face mais qui sait aurait-il été assez fort pour la protéger de tous ces malheurs ? Il n'en était pas moins sûr...

Alors, comme ça Justin allait parler de moi à Clay, belle erreur. Si j'étais un mec, jamais je n'irais voir l'ex de la fille que je convoite, surtout lorsqu'on ne sait pas le passer qu'ils ont en commun. Et vu le notre. Enfin de toute évidence ils c'étaient bien entendus, tant mieux pour eux. Même si je trouvais toute cette histoire glauque à souhait. Et puis après tout ils font ce qu'ils veulent, ça ne me regardait en aucun cas. J'aurais tout de même aimer savoir la réaction de Clay lorsque Justin lui avait poser ses questions, voir la tête qu'il faisait, j'aurais payé cher pour ça, mais bon. Peu importe. « J'en sait rien Clay, je ne sais pas ce que tu penses de moi, de nous, donc je ne sais pas ce que tu aurais dû faire. » Il n'y a encore pas si longtemps je pouvais deviner ses moindres réactions, ses gestes, sa façon de penser. Aujourd'hui c'est tout simplement comme si nous étions devenus étranger l'un à l'autre. Et ça me faisait une sensation vraiment bizarre. Je ne pouvais pas croire que la personne qui me connaissait si bien il y a quelques années, ne sache plus vraiment rien de moi maintenant. « J'ose espérer en effet que tu ne lui as pas dit ça. Et que par contre à moi tu me l'a dit sous le coup de la colère, si je te connais encore un tant soit peu. Mais je ne sais pas, je ne sais plus. » Je n'irais surement pas voir Justin pour connaitre le fin mot de l'histoire, cette conversation n'appartenait qu'à nous, je ne voulais pas l'impliquer là-dedans. Après avoir traîné Clay dans les toilettes, je n'avais pas pensée que les gens se feraient une idée de ce que nous pouvions faire là-dedans et surtout je n'ai pas une seule seconde pensée que ça pouvait le gêner, mais j'avais des choses à lui dire et il devait m'écouter, par n'importe quel moyen. Une fois mon discourt déballé, je tournais la tête, je ne pouvais pas regarder son regard en sachant que soit il s'en foutrait, soit, ce serait l'inverse et je ne voulais pas voir de regret sur son visage, je ne voulais pas qu'il s'en veuille pour tout ça. Ce n'était pas comme-ci ça avait été sa faute. « Tu es désolé ? Mais, désolé de quoi ? D'avoir pensé que j'avais grandis dans un monde utopique ou de te rendre compte à quel point j'ai morflé ? » Je m'éloignais doucement de lui et soupirais. « Pas la peine d'être désolé, on ne peut pas changer le passé. »

21 août ; &SARAH

Sarah était visiblement vexée que les deux garçons aient osé parler d'elle en son absence. Elle s'imaginait probablement les discussions typiques entre mecs où ils débattaient sur les courbes intéressants de la jeune femme et des manières de pouvoir l'atteindre. Justin aurait pris des notes pendant que Clarence lui aurait prodigué des conseils plus ou moins intimes. Et puis quoi encore ! Espérait-elle qu'elle lui dise que ça l'avait énervé d'abord le sujet avec un mec qui était intéressé ? Qu'il aurait préféré le noyer plutôt que de lui dire qu'il n'empiétait sur aucune histoire, comme il l'avait sagement fait ? Il n'allait pas réellement lui dire ce qu'il pensait d'elle ou bien d'eux deux tout simplement parce que c'était prendre plus de risques que d'obtenir du positif en retour. Il n'était pas homme à se battre dans le vide, il se battait pour des causes qui valaient le coup. Sarah espérait même qu'il ait dit ça sous le coup de la colère pour la blesser volontairement. Bien sûr qu'il ne pensait pas vraiment toutes les horreurs qu'il avait dites du moins pas dans sa forme vulgaire. « Est-ce que je t'ai déjà manqué de respect oralement en dehors d'un coup de sang ? » Cette question rhétorique suffirait à lui donner sa réponse. Ils finirent pas se réfugier dans les toilettes de la patinoire pour poursuivre cette discussion en paix même si celle-ci tournait en rond depuis le début. Ils n'avançaient pas et Clay était de plus en plus las d'être ici. Il voulait la fuir, rentrer et se gaver de nourriture sucrée avant d'aller courir quelques heures, histoire de chasser toutes les idées mauvaises qui affluaient à son esprit à ce moment même. Sarah finit par lui déballer tous les malheurs qui étaient survenus suite au départ de Clarence. Il ne savait pas s'il en était responsable en partie mais il se sentit soudain tout penaud. Ainsi il n'avait pas su être là pour épauler Sarah durant toutes ces épreuves, pour la protéger de la main violente de son père ou des effets dévastateurs de la drogue... Il ne sut que bredouiller quelques excuses mais Sarah ne s'en contenta pas bien sûr. « Non, d'avoir cru que mon absence te serait bénéfique. » Et il avait fini par s'en persuader pour ne pas regretter d'avoir laissé sa copine pour les parcs nationaux et les créatures sauvages. Que pouvait-il faire maintenant ? Le pardon était impossible. « Alors pourquoi me reproches-tu de ne pas avoir été là ? Aujourd'hui tu es une femme belle, épanouie et en pleine forme. Au final, tout ça t'aura forgé une force inégalable. Je ne suis pas là pour te rappeler ton douloureux passé. »

Cette conversation tournais en rond et elle allait sans doute finir mal. Il fallait que ça s'arrête ! Maintenant. Je ne voulais plus me prendre la tête avec Clay, ça n'en valait vraiment pas la peine et puis j'avais besoin de lui ici, son soutien, sa présence. Alors, je devais juste prendre sur moi et ne plus lui parler de tout ça. J'avais voulu des réponses, me voilà servi ou pas. En tout cas ça avait tourné comme je l'avais imaginé, aucune surprise...« Non Clay, seulement des coups de sang, lorsque nous sommes ensemble, ils sont fréquents. Et je ne parle pas seulement pour toi. » Heureusement que nous n'en étions jamais venus aux mains. Malgré tout le respect que nous pouvions avoir l'un pour l'autre, nos cratères sont bien trop incompatibles. J'espérais juste que malgré tout ça nous pourrions rester amis, puisque de toute évidence c'est tout ce qu'il nous restait. Enfin, c'est ce que j'espérais. Ensemble dans les toilettes je le sentais fatigué de tout ça, fatigué de cette conversation. Je le comprenais plus ou moins, moi je cherchais des réponses, lui voulais juste éviter les conflits...Si c'était ce qu'il voulait alors je devais le laisser tranquille et le laisser partir. « Et bien tu t'es trompé, elle ne l'a pas été, mais peu importe. Tu as fait tes choix j'ai fait les miens. » C'est vrai que de la façon dont je lui avait déblatéré mon discourt il aurait presque pu croire que tout était de sa faute, mais ce n'était pas son genre et surtout ce n'était pas le cas. Une force inégalable, je le dévisageais une seconde et me mordait l’intérieur de la lèvre, il n'avait sans doute pas tord et mes cicatrices le prouvaient sans doute. Mais en dessous la carapace de la fille forte et dure, ce cachais autre chose, une fille perdue, désorientée et fragile, celle que personne ne cherchait à voir et à comprendre. « Aujourd'hui je ne te reproche plus rien. Je t'en ai voulu quand tu es parti, je t'ai haï autant que je t'ai aimé. Mais c'est fini, je ne peux pas t'en vouloir pour des choses que tu n'as pas provoqués. Il me fallait juste quelqu'un à maudire... » Je haussais les épaules et lui laissait le champ libre pour partir. Le retenir ici n'était vraiment pas une bonne idée. J'ouvrais la porte des toilettes et plongeais mon regard dans le sien. « On se voit dans à la villa. »

21 août ; &SARAH

Une machine à remonter le temps les avait envoyés tout droit dix ans en arrière. Les deux ex étaient juste en train de revivre les éternelles disputes qui les avaient séparés, souvent agrémentées d'incompréhension et d'obstination vaine. Dès que l'un était incapable de reconnaitre ses erreurs, l'autre lui faisait méchamment comprendre et vice versa. Ce coup-ci c'était le tour de Clarence. Il remerciait seulement Sarah de ne pas lui avoir fait une esclandre publique car ils auraient fait la une des prochaines chroniques avec une entente aussi volcanique. Ils avaient parlé, s'étaient confiés, s'étaient fait des reproches comme toujours mais ni l'un ni l'autre n'était capable de passer au-dessus. Clay remerciait la production en quelque sorte de les avoir réunis car ça lui permettait de comprendre que jamais il ne tiendrait autant à Sarah de la même façon qu'il était toujours incapable de la comprendre. De comprendre ses malheurs et de les respecter. Lui n'avait jamais manqué de rien et il avait tout de même trouvé le moyen de s'en plaindre et de quitter le domicile familial pour aller vivre ses propres envies. Il aurait souhaité qu'ils échangent leur vie rien que pour alléger le cœur de Sarah mais ça relevait un peu des rêves de gosses totalement stupides. « Et j'ose espérer que tes choix sont les bons. » Une nouvelle fois, il sous-entendait des choses sans le faire vraiment. Clay est à la fois quelqu'un d'honnête et terriblement renfermé dès qu'il s'agissait de creuser un peu plus. Et Sarah semblait baisser les bras, ce qui semblait la solution la plus sage pour l'heure. Il n'était ni en mesure de lui avouer ce qu'il ressentait vraiment, ni dans le vouloir de le faire d'ailleurs. « C'est toujours plus facile de maudire les absents. Je n'en ai pas souffert, j'espère juste que ça t'a soulagé de croire que j'en étais en partie responsable. » Répondit-il, froid. C'était à son tour de jouer les vexés mais il ne prit même pas la peine d'attendre que Sarah ne lui réponde. Rabaissant son bonnet près de ses yeux, signe qu'il était énervé, il la dépassa puis quitta la patinoire sans un mot, d'un pas rapide. Ouais, à plus dans la villa...

sujet terminé.

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