22 août ; &SCAMPI

Une forêt. Sitôt que Clarence avait découvert qu'ils évolueraient dans un village entier, il avait chercher un coin de verdure telle qu'une forêt. Ca lui rappelait un peu son chez-lui, avec les bestioles, les arbres et tout ça. Il aimait le bruissement des feuilles, les cris des bêtes, l'air vivifiant qui donnait l'impression que tout le bois prenait vie. Ouais c'était un petit peu son côté gourou écolo mais il l'assumait entièrement. Il n'avait eu le temps la première semaine de s'y aventurer - il fallait dire qu'il était primordial d'apprendre à connaitre tout le monde. C'était donc en cette nuit tombante qu'il s'était éclipsé de la maison pour aller y faire un tour. La nuit c'était toujours plus drôle, et plus effrayant accessoirement mais Clay avait le goût du risque. Il avait vissé un bonnet noir sur sa tête pour cacher la masse informe qui lui servait de cheveux ces derniers temps - pas de coiffeur parmi les habitants ? - puis était parti seul. La forêt était peu accueillante lorsque la nuit tombait mais il n'en tint rigueur. Il marchait sous les arbres feuillus qui cachaient un peu le ciel. Soudain, il entendit un bruit de bruissement de feuilles à quelques mètres de lui. Pitié faites que ce soit un petit écureuil sympathique et non un gros sanglier enragé. Clarence s'approcha silencieusement du buisson puis en écarta les feuilles. Aussitôt une créature lui sauta dessus mais elle fut un peu plus humaine que prévu. En effet, la miss à la poitrine désirable lui avait littéralement sauté au cou visiblement soulagée de trouver quelqu'un. Manquant de tomber à la renverse, Clay se rattrapa au premier tronc à portée de main. « Quoi tu te fais attaquer par une famille d'écureuils ? Tu leur as volé leurs glands c'est ça ! »

Parcourir la forêt aux alentours de 22/23h ? Je ne sais pas ce qu’il m’est passé par la tête. J’imagine que, sur le moment, j’ai cru que j’avais l’âme d’une aventurière, au fond de moi-même, vous voyez ? Que j’étais une Lara Croft en puissance, prête à remuer toute la forêt sauvage (sauvage, oui, oui, une forêt sauvage) pour je-ne-sais-pas-trop-quoi, mais vous voyez le principe. Hors, j’ai oublié quelques détails. Genre, le fait que je ne sache absolument pas me repérer sans indication. Et encore, parfois, même avec indications. C’est parce que les indications sont contre moi parfois. Je vous assure. Enfin, bref. L’ennui, donc, dans cette aventure, c’est que rien est à ma faveur, vous voyez. Déjà, je suis seule. C’est que, de demander « viens on va explorer la forêt » à quelqu’un, je pense pas que j’aurai fait bonne impression, vous voyez. Alors j’y suis allée seule, comme une idiote, comme une nana courageuse et débrouillarde, alors que ça, je ne le suis que dans mon milieu naturel, vous voyez. Et donc, pas une forêt. Et le pire ? C’est quand on se perd. Genre, qu’on fait six fois le tour de tout, et que ça donne rien de bon. Quoi que, non, le pire, en fait, c’est quand on entend des bruits bizarres. Dans la forêt. Alors. Je me suis cachée, vous comprenez ? Pour ne pas me faire dévorer par … je ne sais pas trop quoi. Et puis. J’ai attendu, et je me suis dit que j’allais mourir dans une forêt. Voilà. Plus de Scampi, genre, jamais. Et puis, des bruits. De pas. J’ai attendu, des fois que ce soit un sanglier sauvage qui se fasse passer pour un humain pour mieux me piéger. Et puis, je le vois. Lui. Mon sauveur. Un candidat. Je lui saute dessus, genre, d’un coup, au cou, en me tenant au maximum contre lui. Il parle, tente une blague, mais en fait, j’écoute pas. Désolée, je réalise seulement que je suis sauvée, vous comprenez. « TOI JE T’AIME, TRES FORT, TRES TRES TRES FORT, TU M’AS SAUVE LA VIE. J’ai cru que j’allais passer la nuit dans la forêt, ou toute ma vie, je sais pas, c’était affreuuuuuuuuux ! » Et, non, je ne le lâcherai pas pour l’instant.

22 août ; &SCAMPI

Apprendre à se repérer dans la forêt - en particulier les nombreux bois de Yellowstone par exemple - avait pris des mois si ce n'est des années à Clarence. Des mois de cartes à l'envers, de grands sacs à dos remplis au cas où il se cassait la patte comme dans les films, des mois de frayeur et de vieux livres poussiéreux pour apprendre la position des étoiles et du soleil. Et autant vous dire que la position des étoiles et du soleil était un sujet particulièrement morbide d'ennui. Mais l'effort avait payé et désormais Clay était capable de vous trouver les points cardinaux grâce à la mousse des arbres et de sortir d'une forêt feuillue grâce à quelques astuces qu'il ne révélait jamais. Oui Clay aimait sortir sa science et surtout jouer les grands sauveurs. Il avait besoin de reconnaissance et ça passait par son altruisme. Autant dire que lorsqu'une demoiselle se jeta à son cou comme si elle avait vu le messie, il en fut d'abord surpris puis satisfait. Enfin, il ne savait pas vraiment dans quoi il s'était embarqué puisqu'elle ne daignait pas le lâcher comme si on allait la kidnapper si elle quittait ses bras. Scampi ne manqua pas également de lui crier bien fort dans les oreilles à quel point elle l'aimait. Tapotant dans son dos pour la calmer, le blond recula légèrement son visage du sien pour éviter de perdre un tympan dans l'histoire. « Moi aussi je t'aime bien... » Il fureta à droite puis à gauche pour chercher la raison d'une telle panique mais il n'y avait rien sinon la lumière qui baissait peu à peu sur l'horizon. Elle croyait qu'à cette heure-ci elle gambaderait dans des clairières lumineuses et colorées comme dans les films ? « Ca fait combien de temps que tu es là ? » Peut-être la raison de sa peur résidait dans le fait qu'elle était coincée là depuis le début de la journée, en quelle cas il ne résisterait pas à l'envie de se moquer d'elle. Cependant, d'humeur taquine, une idée traversa son esprit. Son visage se décomposa tandis qu'il fixait un point invisible à l'horizon. Il resserra l'étreinte de Scampi puis demeura immobile. Son visage paraissait horrifié. « Ne bouge surtout pas... Et ne retourne pas, s'il te plait. »

Lui, il n’a pas l’air d’apprécier ma déclaration d’amour. Tss. Tant pis. Je n’en ferais plus jamais. Je deviendrais une handicapée des sentiments qui n’osera plus jamais déclarer sa flamme ni rien par sa faute. Voilà. Mon destin est tout tracé à cause de lui. Finalement. Il m’aime bien aussi. Bon. Il se rattrape bien le garçon. Et puis, il me demande depuis combien de temps je suis ici. Bonne question. Excellente question même. Une demi heure. Ou trois quarts d’heures. Ou une heure. Ou deux. Je sais pas. J’ai pas de montre. Je sais pas lire l’heure avec le soleil, moi. Enfin. Un bout de temps, dans ma tête, en tout cas. J’ouvre la bouche, prête à lui répondre (même si ma réponse, finalement, ne l’éclairerait absolument pas hein) quand sa tête change. Et pas dans le bon sens hein, genre, elle passe pas de « malheureux » à « heureux » vous voyez. Il a l’air d’avoir un truc, derrière moi. Je suis sûre que c’est une bête, genre, énorme, genre, je vais mourir là et on va me déchiqueter. Enfin. D’abord, on va me déchiqueter, et ensuite je vais mourir, bien entendu. Sauf si la bête préfère me déchiqueter, me tuer, et me déchiqueter encore. Je sais pas. Je suis pas dans sa tête. Bref. Autant dire que je ne peux pas être plus collée que ça contre Clarence, et que je ne bouge pas d’un poil. J’ose à peine ouvrir la bouche pour répondre à Clarence, vous voyez, des fois que ma voix suffise pour produire un truc. « C’est quoi ? » Loup, sanglier, lion (oui, oui dans une forêt), loup garou, mort-vivant, Freddy Krueger ?