Ft. Caleb


Il n'y avait rien à faire. C'était maintenant un fait, une évidence, je n'avais absolument pas le sens de l'orientation. Je tournais en rond depuis plus de trois heures. Le soleil commençait à se coucher alors que la nuit pointait tout doucement, mais surement, le bout de son nez. Je ne savais plus comment retrouver mon chemin. A chaque fois que je faisais un pas, j'avais l'impression d'être déjà passé par là. Le décor était le même partout. Les arbres se ressemblaient tous. Voilà que je laissais un soupir d'agacement s'échapper dans les airs. « Putain, mais quelle grosse conne je suis. » Je marmonnais. Je m'en voulais. C'était bien fait pour moi après tout, ça m'apprendras à vouloir m'aventurer en terre inconnue en fin de journée. Je commençais sérieusement à en avoir ras le bol et dans un nouveau soupir je venais poser mes fesses sur le sol, au milieu des feuilles mortes. En tailleur, je regardais tout autour de moi. Il faisait de plus en plus sombre. Je ne le montrais pas, mais je n'étais spécialement rassuré. Le bois craquait. Je sursautais. Mon coeur cognait contre ma poitrine. Mon sang coulait si vite dans mes veines que j'en avais mal au crâne. Instinctivement, je me tournais. Rien. Il n'y avait personne. Un oiseau noir s'envolait au dessus de ma tête. Rien de bien rassurant, mais rien de bien effrayant non plus. Le froid s'abattait tout doucement sur le village, sur ses alentours. Le temps se couvrait. Oh non. Flip. Flap. La pluie faisait son apparition avant qu'un éclair ne vienne déchirer le ciel. La gamine que j'étais se mettait en boule, comme si je voulais me protéger. En silence, je priais pour qu'une personne de la production ou bien un candidat se rende compte de mon absence. Je voyais déjà le décor du prochain prime. Un hommage à la jolie petite Lenny dont le corps sans vie avait été retrouvé juste à côté d'une étendue d'eau puante et boueuse.

Mais qu’est-ce que je foutais là ? J’avais eu envie d’un petit bain de minuit et je vous vois déjà dire qu’il n’est que vingt-et-une heures mais je m’en moque, il faisait presque nuit et ça me suffisait pour dire que je prenais un bain de minuit à ma manière. Le problème c’est que je n’avais pas prévu de me perdre entre deux chemins, les petits panneaux qui servaient uniquement à donner bonne conscience aux employés de la ville qui ne seraient pas les fautifs de cette manière si des touristes s’égaraient dans les bois avaient eu raison de mon orientation. Je prévoyais de me rendre aux cascades désireux de pouvoir plonger du haut de la colline par la même occasion et à la place je me retrouvais à côté des vieux marécages qui puaient et me dégueulassaient mes chaussures plus qu’autre chose. Même dans les poubelles dans lesquelles je vivais depuis un peu plus de six mois l’hygiène n’était pas aussi basse. Une petite grimace ancrée sur les traits de mon visage pour combattre l’odeur infecte, je m’apprêtais à rebrousser chemin mais la pluie qui commençait à s’abattre sur moi avait eu raison de ma motivation. Accelerant mes pas pour m’asseoir contre le premier arbre qui se profilait devant moi je tombais nez à nez avec une jeune fille que je n’avais pas vraiment reconnue sur le coup. Elle était candidate, son visage me disait quelque chose. « Hey ça va ? T’es candidate n’est-ce pas ? Moi c’est Caleb ! »