La semaine passée, je n’avais pas vraiment discuté avec Clarence. En réalité je l’avais plus croisé qu’autre chose, nous habitons dans la même chambre, il est donc difficile de ne pas le voir, mais de ne pas lui parler, ce n’est pas si dur que ça. J’avais peur d’avoir une conversation avec lui vu ce que nous nous étions dit la dernière fois. Je me dis que si je ne le voyais pas je ne penserais pas à lui et je cesserais donc d’être amoureuse, mais apparemment cette technique ne fonctionne pas vraiment. Je sais qu’il n’est pas intéressé par moi, absolument pas, il faut dire que je suis peut être un peu trop jeune, que je ne suis pas assez mure, mature, que je ne connais pas assez la vie. Cette fois, je pris mon courage à deux mains, et je décidais d’aller lui parler, je fis le tour de la maison, mais ne trouvant aucune trace de lui, j’abandonnais en allant retournant dans ma chambre, mais quel ne fut pas ma surprise lorsque je le vis ici.

Depuis que les maisons avaient été réunies, Clarence n'avait pas eu l'occasion de parler à Rosaline. En fait, depuis la déclaration d'amour qu'elle lui avait fait, il n'avait pas osé lui adresser la parole sauf pour des futilités. Il avait peur de sa réaction, qu'elle lui en veuille que ses sentiments ne soient réciproques. Non, ça n'était pas un lâche, il était juste maladroit pour les affaires amoureuses et ça ne datait pas d'hier en fait... Après s'être fait un déjeuner d'une frugalité de roi, il avait opté pour une petite sieste bien méritée. Malgré un lendemain de prime, il n'avait pas failli à faire son jogging matinal même si le réveil avait plutôt dur. D'autant plus qu'une minute à l'autre, Dora reviendrait accrochée à son poignet pour de longues heures de compagnie. Il s'était allongé dans son lit, enfin s'était négligemment laissé tomber dessus la tête dans l'oreiller. Clay était prêt à ronfler immédiatement quand il entendit la porte s'ouvrir. Depuis le départ de Berlioz, l'ambiance de la dépendance s'en était faite sentir mais son retour pour une semaine allait faire du bien à toute la maison et lui en premier. Donc alors qu'il espérait voir sa petite bouille de naine, il dut faire face à la silhouette longiligne de Rosaline. Le destin ne faillait jamais à son travail, jamais. Se redressant soudainement pour montrer qu'il lui portait attention, il la salua: « Rosy... » Dans un élan de spontanéité, il se hissa juste assez pour atteindre sa taille qu'il saisit à pleines mains. Il l'attira à lui pour qu'elle tombe sur son lit puis fourra sa tête dans son cou sans la lâcher, comme un enfant pris la main dans le sac. Puis automatiquement il murmura d'une voix étouffée: « Je suis désolé. »

Clarence ne comprenait toujours pas pourquoi Rosaline avait jeté son dévolu sur lui. Il y avait eu tant de garçons dans cette maison, plus jeunes, plus fêtards, plus ouverts et certainement plus civilisés. L'avait-elle choisi parce qu'il avait été le seul dans la chambre à être célibataire ? Parce qu'il avait été gentil avec elle ou parce qu'il était blond ? Bref que de suppositions les plus farfelues les unes que les autres tandis qu'il demeurait toujours sans réponse. Il ne lui avait jamais posé la question et s'en garderait bien tant qu'ils seraient encore au sein de la villa, afin de lui épargner de nouvelles humiliations involontaires. Lorsqu'il la prit dans ses bras, Clay n'eut même pas peur qu'elle ne méprenne son geste. Il lui avait clairement avoué que ses sentiments n'étaient pas réciproques mais qu'il n'en restait pas moins son ami. Une nouvelle fois, le garde-chasse s'excusa de son comportement - et non de ses sentiments. Celle-ci les refusa et clama même que c'était de sa faute. En fait, ça n'était la faute de personne, juste le coup du hasard qui ne les avait pas réunis pour un amour foudroyant et sincère comme celui de Lennon et Graham. Hum. Esquissant un faible sourire, il ajouta, posant son menton sur le haut de sa tête. « Personne ne t'a fait de remarque ? Je veux dire ils ont un peu oublié cette histoire ? » Clarence n'avait pas vraiment apprécié qu'elle ne subisse des moqueries de la part des téléspectateurs mais la défendre n'aurait fait qu'ajouter de l'huile sur le feu.

Me prendre un râteau devant des millions de téléspectateurs n’avait pas été facile mais je m’y suis faite. J’avais tout de même eu le soutien des chroniqueuses de l’émission, ce qui m’avait fait très plaisir, même si je sais que ça n’arrangera pas la situation entre Clay et moi. IL était gentil avec moi, j’avais de plus en plus l’impression que je lui faisais un peu pitié, du genre « regardez cette fille toute seule », je n’aime pas faire pitié, enfin je ne veux pas avoir la pitié des gens, je préfère être détestée que ça. J’espère en tout cas que ce n’est qu’une impression et pas la réalité, parce que je suis sure que je ne le prendrais pas très bien si c’était la raison pour laquelle il est gentil avec moi. « t’inquiètes pas pour moi, ça va. Ce n’est pas la première fois que je me fais jeter t’inquiètes pas. » j’ai connu assez de malheur amoureux pour écrire un livre je crois. On pourrait croire que je suis une dévergondée qui drague tout ce qui bouge vu la liste de mes ex petits amis, mais pas du tout, c’est juste que je me fais jeter très peu de temps après m’être mise en couple, pourtant je suis naïve et je continue de croire que l’amour existe, après tout je n’ai que dix-huit ans. « j’ai une question, qui va être un peu bizarre mais on n’est plus à ça près. Pourquoi est-ce que tu ne m’aimes pas ? » je vais partir vivre au fin fond de l’Amazonie, c’est sur.

C'était forcément évident que pas mal de téléspectatrices en particulier avaient apprécié les mésaventures de Rosaline. Elles devaient y voir là l'allégorie de toutes les déceptions amoureuses qu'elles avaient subi et soutiendraient donc la jolie jeune fille. Même les chroniqueuses avaient pris parti pour elle et même si ça ressemblait à de la pitié, Clarence était certain qu'elle était appréciée à l'extérieur. Elle avait été elle-même jusqu'au bout, qu'importe si ça pouvait paraitre naïf ou si ça pouvait lui nuire. Et Clay appréciait ces valeurs-là. C'est pour ça qu'il ne pouvait se résoudre à s'éloigner d'elle pour la préserver, ou bien garder ses distances pour ne pas la faire souffrir. Elle faisait partie des personnes fragiles qu'il avait envie de mener le plus loin possible. Ca n'était en aucun cas de la pitié, il n'éprouvait ce genre de ressentiment que lorsque la personne se complaisait dans son malheur, autrement dit les lâches. Et franchement, qui peut parler de lâcheté quand Rosaline a avoué ce qu'elle ressentait derrière une vitre, ce devant tous les États-Unis en savant pertinemment qu'il n'y avait aucune réciprocité. A cette pensée, il la serra un peu plus contre lui, presque fier d'elle. Elle s'en remettrait sans aucun doute, il n'était que son coup de coeur de l'aventure et non son prince charmant. « Ca n'est pas une raison. On s'est tous fait un peu jetés moi le premier. » Dit-il avec un petit sourire en coin comme si ça allait être drôle. Presque dix ans les séparait mais Clay demeurait persuadé qu'ils avaient vécu les mêmes péripéties de jeunesse... Cependant, la gymnase lui posa une question plutôt incongrue. Pourquoi ? Est-ce que réellement l'amour pouvait se commander ? Oh que non, il en faisait les frais en ce moment même. Son visage se referma quelque peu avant qu'il ne dise d'une voix plus éteinte: « Je ne sais pas, je suppose que je n'ai pas eu le truc comme on dit. » Réponse stupide. Il pouvait le faire. « Je crois que je vis dans le souvenir, en fait... Et je n'ai pas envie de vivre quelque chose sous le souvenir, je suppose qu'il faut que j'oublie d'abord. » Il lui jeta un coup d’œil furtif comme pour qu'elle approuve ses dires. Se trouvait-elle être finalement le soutien qu'il recherchait ?

J’avais posé une question débile. Savoir pourquoi on aimait ou n’aimait pas quelqu’un en amour est très difficile, il peut y avoir des tas de raisons totalement rationnelles comme d’autres beaucoup plus flou et illogique. Je pense que si un jour quelqu’un me pose cette question je lui dirais : je ne sais pas. J’ai posé une question à laquelle moi-même je n’aurais pas su répondre. Sortie de son contexte la phrase précédente peut paraître arrogante et narcissique quand même. Bon bref. Je n’avais pas réellement envie de partir dans un débat sur l’amour ou d’avoir une discussion construite avec lui. C’est bizarre comme situation en fait, je ne sais pas trop quoi faire. « tu sais, tu devrais devenir philosophe ! En plus t’as déjà les cheveux longs » dis-je en riant. Eh ouai j’ai un humour de merde.

hj : c'est court, j'suis en retard, c'est pourri, shame on me !